Les territoires français d'outremer les plus isolées de la planète, à savoir Wallis et Futuna, accessibles uniquement à partir de Nouméa, en Nouvelle-Calédonie (un autre TOM qui a décidé d'imiter la Nouvelle -Zélande et l' Australie voisine en matière de stratégie sanitaire ) viennent d'être rattrapés par le virus, entré subrepticement à Wallis et qui est resté tapi de longues semaines avant de se déclarer. Et ceci, malgré une politique locale de strict isolement des rares arrivants qui paraissait plutôt efficace.
Mais le virus, on le sait, se joue des frontières, aussi hermétiques qu' elles puissent être, en particulier quand il s'agit de protéger des îles du monde extérieur, forcément hostile....
La stratégie zéro COVID que le gouvernement français a imposé aux territoires et départements d'outremer a-t-elle un interêt sanitaire et est-elle viable encore longtemps ou bien destructrice d'emplois et d'image dans des territoires très dépendants du tourisme international ?
Cette stratégie avait fait ses preuves jusqu'à présent, du moins à Wallis, mais il semble que la gestion des quatorzaines n' ait pas été suffisamment rigoureuse, même si l' on ignore réellement comment le virus a pu débarquer sur Wallis, les arrivants ayant été testés négatifs plus d'une fois.
On notera qu'elle n' a pas été appliquée de la même façon partout car les compétences ne sont pas les mêmes selon les territoires, étatiques dans les DOM, mais partagées dans les TOM qui ont donc eu le loisir de définir une stratégie sanitaire propre, indépendamment de ce que souhaitait le gouvernement central ( du moins en 2020 ).
Ainsi, pour des raisons touristiques et parce que la Polynésie est extrêmement dépendante du tourisme international, le ciel polynésien a été officiellement ouvert à la mi-juillet 2020 avec les conséquences et résultats que l' on connait ( je vous renvoie à mes points quasi hebdomadaires ). La situation est gérée et maîtrisée, du moins pour le moment, et la vaccination commence à aller bon train, ce qui pourrait signifier un succès à venir dans la lutte contre le virus.
En revanche, la Nouvelle-Calédonie est restée fermée ces douze derniers mois au trafic international. Les rares visiteurs ( résidents et autres ) subissent une très dure quatorzaine en isolement total. Ceci vaut aussi pour Wallis et Futuna ainsi que pour St Pierre et Miquelon. La situation économique est préoccupante, le tourisme se taillant aussi la part du lion en NC, d'autant que le pays est en pleine crise politique et industrielle ( usines d'extraction de nickel en difficulté ).
Dans les départements et les régions comme la Martinique, la Guadeloupe ou la Réunion, la France n' a pas le droit d'imposer un isolement strict dans un hôtel à l'arrivée des voyageurs, et ceci en raison d'une décision de la Cour Constitutionnelle qui empêche le préfet d'imposer une septaine ou quatorzaine. En effet, cette Cour avait considéré en mai 2020 l'isolement complet comme une mesure ' privative de liberté ' : celui-ci implique une interdiction de toute sortie et impose " à l'intéressé de demeurer à son domicile ou dans son lieu d'hébergement pendant une plage horaire de plus de douze heures par jour ", une contrainte jugée liberticide.
Mais ce qui n' est pas possible à la Martinique l' est en Nouvelle-Calédonie, où la compétence est partagée entre l'Etat et le gouvernement calédonien qui a verrouillé les frontières terrestres, maritimes et aériennes et ne laisse rentrer de nouveaux arrivants qu' en fonction de l' occupation des 600 lits d' hôtel disponibles sur le Caillou.
La quatorzaine était gratuite en mars dernier, elle est désormais payante en NC comme en PF comme en Nouvelle Zélande ( 3000 dollars NZ pp ) ou en Australie ( 3000 dollars AUS pp également ).
" Nous adoptons la stratégie zéro-COVID de nos voisins australiens et néo-zélandais qui a fait ses preuves. C'est un peu écraser une mouche avec un trente tonnes mais c'est une stratégie qui marche ", a déclaré le porte-parole du gouvernement, Christopher Gygés.
Une stratégie qui balaie allègrement aussi les libertés individuelles, ouvre la porte aux excès d'autorité et fait plonger les économies. La question est : Jusqu'à quand ? Et combien de temps ?
En ce qui concerne la Polynésie largement épargnée par le virus au départ, le choix du gouvernement polynésien a été d' ouvrir le Pays. En novembre, la propagation du virus était alarmante mais les autorités locales n' ont pas voulu confiner pour éviter un effondrement de l' économie. Quand les variants sont apparus, le Ministère a exigé un retour vers des mesures zéro-COVID, et donc la fermeture des frontières aux touristes sans motifs impérieux. Ce n' était pas le choix des autorités politiques polynésiennes qui n' ont, depuis octobre dernier, imposé qu'un couvre-feu supportable et les mesures-barrière connues.
Actuellement ce sont 250 personnes qui débarquent chaque semaine à Tahiti.
Le dilemme touristique polynésien est aussi celui de la Martinique et de la Guadeloupe qui ont connu une brève embellie touristique autour de Noël avant l' imposition de contraintes.
On prend la Nouvelle Zélande et l' Australie comme modèles sans savoir comment les habitants de ces pays ressentent la privation de libertés ( en échange d'une vie confortable ). Personnellement, je le sais, mon fils résidant à Sydney. Et la situation, au fil des mois qui passent, n' est pas idyllique, loin de là !!!
Ces deux pays n' en ont même pas profité pour commander des vaccins à temps et vacciner massivement... L' incurie et l' insouciance ne sont pas le propre de la France dans ce domaine !
Le Ministère veut tendre vers une stratégie zéro-COVID dans tous les territoires ultramarins sans prendre en compte les spécificités, les fiertés et les humeurs des uns ou des autres, inconnues des technocrates parisiens qui prennent les décisions, également sans qu' il y ait de visibilité quant à la réouverture des frontières. Mai ou juin ou plus tard ?
Attendons de voir comment la situation évolue...
Merci Denis pour ce point précis 🙂