Ce voyage interne à la Polynésie est notre première sortie de Tahiti depuis plus de 6 mois.
C' est grâce au E-Salon du Tourisme du mois de février et à ses tarifs alléchants ( 50% du billet d'avion ) que nous nous sommes décidés à partir à la découverte d'un autre atoll des Tuamotu, chacun d'entre eux étant spécial et unique, différent de ses voisins, que ce soit par son histoire, son peuplement, ses coutumes, sa flore et sa faune.
On a du mal à l' imaginer et pourtant, c'est ainsi. Bien sur, il y a des points communs à tous ces atolls, mais il y a toujours un petit quelque chose qui permet de distinguer l' un de l' autre ! Cap au nord-est donc dans quelques jours.
Je profite de ce we pour faire une présentation en externe de l' atoll.
UN PEU DE GEOLOGIE
Kauehi est l' excroissance corallienne du sommet d'un mont volcanique sous-marin, mesurant 1535 mètres à partir du plancher océanique et vieux d'environ 55 millions d'années.
UN PEU DE GEOGRAPHIE
Kauehi - ou Putake en langue paumotu - est situé au plus proche de l' atoll de Taraka, à 45 kms au nord-est de Fakarava et à 460 kms de Tahiti. C' est un atoll de forme ovoïde, d'une longueur de 24 kms sur une largeur de 18 kms pour une surface de terres émergées de 15 km2. Le lagon est grand ( 320 km2 ) et accessible par une large passe navigable dite passe Arikitamiro ( de 200 mètres de large et de 9 mètres de profondeur )
La passe, le chenal et l' arrivée au village ( jetée bétonnée ) par le lagon sont balisés de jour et de nuit.
L' atoll fait partie d'une vaste réserve biosphérique nommée comme telle par l' UNESCO, le classement ayant été renouvelé plusieurs fois depuis sa création, dont les dernières fois en 2006 et en 2017.
Je vous renvoie au post précédent pour plus de détails.
En 2017, l' atoll comptait environ 550 habitants, la plupart regroupé dans le village de Tearavero situé sur le grand motu principal à l' est. Dans le village, les bâtiments principaux ont été construits à la chaux corallienne ( pour le scellement des blocs de corail servant à monter les murs ) selon les méthodes traditionnelles en cours au 19ème siècle.
Deux bâtiments sont remarquables : l' église dédiée à Saint-Marc l' Evangéliste ( ou Mareko Peata ) et la Mairie, anciennement chefferie érigée en 1884, modernisée au début du 20ème siècle, surélevée de 1 mètre 20, et qui a servi de refuge à toute la population lors des cyclones du siècle dernier ( 1903,1906 et 1983 ) et des tempêtes tropicales ou houles déferlantes plus récentes.
L' atoll dispose d'un aérodrome desservi une fois par semaine par Air Tahiti depuis 2001 et accueille environ 2000 visiteurs par an.
On trouve des traces de fosses à culture - ou ' maite ' en tahitien - qui témoignent d'une ancienne activité de culture parfois extensive dans les atolls des Tuamotu. Ces fosses à culture ont été introduites dans tous les atolls des Tuamotu-nord par les féroces et redoutés ( mais très organisés... ) guerriers ' Parata ' originaires de l' atoll de Ana'a dans les Tuamotu-centre / Gambier qui, au fil du 17ème siècle et de la première moitié du 18ème siècle ( en fait jusqu'à l' arrivée des missionnaires ) ont conquis les uns après les autres, les atolls du nord de l' archipel, transformant les vaincus en esclaves travaillant la terre dans ces fameuses fosses à culture, mais aussi les tuant pour leur consommation ordinaire.
Je vous renvoie à mon post sur Ana'a dans VF pour plus de détails.
Comment fonctionnait la fosse à culture ? il y fallait des travailleurs acharnés pour creuser le sol corallien jusque' à atteindre la lentille d'eau saumâtre. Dans une fosse de 10 mètres sur 5 mètres environ, on mélangeait de la terre végétale à de la terre sableuse, l' ensemble étant enrichi de fragments de plantes et de feuilles appropriées pour constituer un riche compost. Rien que de très classique, finalement, mais une mini-révolution sur un atoll corallien plutôt aride et peu fertile.
Et là, on cultivait, indépendamment d'une fosse à l' autre, des tubercules ou des plantes alimentaires telles le ' taro ' ou le ' ape ', et arbres fruitiers comme des bananiers ou des papayers.
Les cocotiers étaient plantés autour des fosses pour faire de l' ombre, mais ont trop vite prospéré, en prenant la place des cultures vivrières, elles-mêmes finalement délaissées car nécessitant une main-d'oeuvre- importante et difficile à trouver sur un atoll, sauf à avoir des esclaves par centaines comme les 'Parata ' de Ana'a !
UN PEU D'HISTOIRE
L' atoll, comme ses voisins, a été jadis habité ponctuellement par des Polynésiens venus pêcher la perles, puis sans doute visité par des marchands de perles, d'autant plus que la passe très accessible de l' atoll en faisait un port de mouillage sur et agréable.
Le premier Européen à avoir foulé le sol de l' atoll fut le capitaine du HMS BEAGLE, l' anglais Robert Fitz-Roy le 13 novembre 1835. Quelques années plus tard, ce fut une expédition scientifique américaine menée par le capitaine de vaisseau Charles Wilkes qui débarqua aussi sur l' atoll qui fut nommé Vincennes, d'après le nom du navire.
FAUNE
L' atoll est classé en tant que conservatoire biologique de haut niveau. il accueille une population endémique de Chevaliers ( ou Bécasseaux ) des Tuamotu, oiseaux migrateurs de l' hémisphère nord, dit limicoles car vivant principalement - ici en Polynésie - sur les bords de lagons, de motu et sur les récifs émergés.
Le retour au Canada ou en Alaska ne se fait, pour ces oiseaux, que la seconde année de leur vie, le voyage étant épuisant malgré quelques étapes.
Kauehi est aussi un site important de ponte pour les tortues marines.
On y chasse la nuit - en protégeant la ressource qui n' est pas inépuisable - le crabe de cocotier, un mets délicat.
A noter que le ' kaveka ' ( une sorte de grosse hirondelle de mer ) rencontrée sur deux motu de l' atoll est toujours consommé, ainsi que ses oeufs pondus à même le sol corallien. Autrefois la gestion des prélèvements sur nids et de la distribution dépendait uniquement d' un comité des anciens, respecté par tous ( ou ' tomite toohitu ' ).
Désormais ce comité n' existe plus, et il s' agit plus de braconnage que d' autre chose...
Comme pour les tortues ici et ailleurs, il sera difficile de faire comprendre à la population dans son ensemble que la consommation d'hirondelles de mer et de leurs oeufs n' est plus d'actualité à l' époque des goélettes apportant régulièrement la viande congelée de Nouvelle Zélande. Mais ce genre de tradition ne disparait pas si facilement, hélas !
Voyons maintenant les arguments à la décharge des Paumotu : le chien, l' hirondelle de mer ou la tortue, ainsi que leurs oeufs, sont hautement protéinés. Difficile de ne pas se servir sur place quand on réside dans une île perdue au milieu du Pacifique, non reliée à Tahiti par voie aérienne, ne voyant la goélette que 3 ou 4 fois par an, et ne pouvant compter que sur les ressources locales. Et puis pour acheter la viande importée, il faut de l' argent, une denrée rare sur un petit atoll. Consommer local est donc imparable !
UNE AUTRE COUTUME D'ANTAN
Il s'agit ici de l' ancien cimetière du village de Tearavero où les tombes sont disposées d'une façon tout à fait originale..
Il est partagé en 4 zones closes bien distinctes:
1 / les hommes, mariés ou célibataires
2 / Les femmes, mariés ou célibataires
3 / les enfants morts-nés ou non baptisés à la naissance
4 / Les pestiférés, concubins ou homosexuels.
Le plus extraordinaire, c'est que cette ségrégation existe toujours aujourd'hui !
En l' absence permanente d'un curé, c 'est un diacre qui officie lors des enterrements. Il a demandé à ses paroissiens de revoir leur manière d'enterrer leurs morts, mais en vain.
On continue comme par le passé !
Voilà j' en ai fini avec cette longue introduction à cet atoll après les photos jointes.
Départ jeudi 4 mars.
Je reprendrai ce post le moment venu, pendant le séjour, j' espère, et à mon retour à Tahiti car la connexion wi-fi n' est pas toujours géniale dans les îles éloignées.
Logement au Kauehi Lodge, donné comme l' un des 3 meilleurs des Tuamotu. C 'est assez inespéré, non, sur un petit atoll comme Kauehi....?
Vue satellitaire de Kauehi
Kauehi en 1861, dessin d'un peintre de la Marine britannique.
Chevalier des Tuamotu : adulte
le même : jeune adulte ( 1 an )
Le même : juvénile ( bagué )
kaveka noir
Oeufs de Kaveka
Mairie de Kauehi
Ancienne fresque conservée après dernière restauration du bâtiment
PS : Paumotu et Marquisiens restent dans leur très grand majorité pro-français dans l' âme. Ils savent ce que leur coûterait l' indépendance de la Polynésie (ou Tahiti Nui ) qui se replierait sur les Îles du Vent et certaines des Îles sous le Vent ( Raiatea et Bora-Bora ) et larguerait allègrement les autres archipels...
Ceux de nos ministres qui se risquent à visiter atolls ou îles hautes marquisiennes reçoivent un accueil inoubliable qui interloque à Paris... on nous aime tant que cela ???
Dessin d'enfant de Kauehi représentant le motu aux oiseaux
Dessin d' enfant de Kauehi représentant le village
Kauehi sur un motu, le mythe polynésien
Hello Denis,
Tes photos de vos repas sont de la provocation pour nous qui aimons la gastronomie des îles ! 😋
Merci beaucoup de nous avoir fait découvrir cet atoll en partageant avec nous votre voyage.
J'ai montré les photos à Valérie qui a conclu par un "faut qu'on y retourne !".
Dans l'hypothèse d'un retour en Polynésie, je pense qu'on voudra revenir dans un atoll des Tuamotus. Vous qui en avez vu un bon nombre, le ou lesquels conseilleriez-vous ?.
La possibilité de pouvoir y faire de la plongée sous-marine est un plus.
Merciiii 😊
Pour terminer, une légende météorologique à l' ancienne...
Il était une fois un grand guerrier du nom de Tagaroafainu qui vivait sur le motu Tagaroamatahara dissimulé sous l' apparence d'un kaveu, mais qui pouvait à l'occasion, prendre la forme d'un nuage - ou ' paku ' - ressemblant exactement à ce crabe des cocotiers tant apprécié des habitants de Kauehi.
On raconte que les anciens voyaient souvent ce crabe si particulier et reconnaissable entre tous car entouré de mousse. Si quelqu'un s'avisait de l' attraper dans le but de le manger, il était impossible de le cuisiner. En effet, il sautait hors de la marmite et disparaissait pour retourner se caler dans l' endroit exact où on l' avait capturé. Et puis, il n' avait qu'une seule pince. Personne ne savait si celle qui manquait était à droite ou à gauche, mais la pince restante pouvait faire très mal et il fallait s'en méfier.
Quand les villageois voyaient non pas le crabe, mais son ' paku ', le nuage ayant sa forme, au dessus du motu Tagaroamatahara, cela leur indiquait qu'un bateau arrivait à Kauehi de manière imminente ou alors que le temps allait tourner et devenir maussade et couvert.
Les récits passés indiquent également que chaque fois que l' on apercevait le fameux nuage du guerrier Tagoraoafainu, on pouvait voir simultanément celui d'Arikitamiro, au dessus de la passe du même nom. Si ce dernier regardait au loin, cela signifiait qu'une tempête était en gestation, mais, si le nuage regardait le milieu de la passe, cela ne pouvait signifier qu'un seule chose : l' arrivée d'un bateau.
Un aperçu de nos dîners en bout de ponton, en toute convivialité.
Poisson cru et perches-pagaies avec légumes du jardin
Kaveu
Kaveu, popoi, galettes de germe de coco, boulettes à la noix de coco, poisson cru à la paumotu
On continue...
mardi 9 mars
Journée détente à la pension.
Nous retournons côté récif à 6 heures du matin. la lumière est exceptionnelle. Impression de beauté intemporelle.
Dernière journée pour profiter de la mer.
Mercredi 10 mars
Retour à Tahiti. Départ 9 heures, arrivée 11 h 10. Escale à Katiu de 20 mn, un atoll du même genre que Kauehi.
A l' aéroport deux minutes avant un grain violent mais bref
Arrivée de l' ATR 72 sous contrôle des pompiers ( de l' aéroport et du village )
Départ de Kauehi
Départ de Katiu
Cette belle journée n' est pas finie...
Nous quittons les motu aux oiseaux pour pêcher à la traîne pendant une heure environ en suivant le littoral intérieur. Personne en vue à part une deux habitants de l' atoll devant une cahute face à une plagette. Quelques petits ' hoa ' sur le trajet qui alimentent le lagon en eau océanique. Puis la passe et une partie de pêche excitante en mer, là où des nuées de noddis plongent se nourrir de petits poissons en surface, lesquels sont chassés par dessous par des poissons plus gros, lesquels sont eux-mêmes chassés par les thons et les carangues.
Une de nos prises terminera dans la gueule d'un requin particulièrement rapide dont on verra le museau et les dents se refermant sur un thon de 5 kgs avalé tout net avec le fil et l'hameçon.
Hoa
Passe
Le vol de noddis nous mène directement vers notre lieu de pêche...
Il faut occire le thon le plus vite possible ( ici avec un poinçon au coeur à un endroit précis derrière une nageoire )
Retour à la pension. Nous aurions pu pêcher le double de poissons, mais nous sommes à court de glace.
Les poissons sont nettoyés et parés immédiatement à l' arrivée.
Nous aurons même le privilège de déguster des lamelles de filet de thon rouge ultra frais, juste rincé à l' eau de mer. Un délice !
On continue...
Samedi 6 mars
Sortie au motu pointe sud. Nous allons traverser le lagon du nord au sud en 40 mn environ, et à bonne vitesse tout de même car le bateau de jean-Claude est équipé de deux moteurs mercury de 150 chevaux chacun. Bateau local Marinalu fabriqué au chantier naval de Raiatea.
Temps magnifique et couleurs de Tuamotu.
Déjeuner au motu également.
Que fait-on au motu ? On s'y baigne bien sur ( quelques massifs de corail magnifiques fréquentés par les poissons, et puis soudain... un énorme mérou qui dort dans une anfractuosité ... ! ), on y marche vers le récif qu' aujourd'hui on peut atteindre facilement.
Couleur d'oxyde de fer, océan limpide et peu agité qui laisse voir les canyons qui descendent vers les profondeur...
' hoa ' asséchés entre océan et lagon, mais qui se remplissent à certaines périodes du mois et jouent leur rôle d'oxygénisation de l' eau du lagon.
Magnifique récif lisse où nous allons ramasser quelques coquillages du genre mulot à faire cuire avec les poissons à la pause-déjeuner
Côté lagon
Déjeuner
Un poisson grillé pour chacun : une variété de perche, excellente, mais souvent dédaignée car ciguatérée. Pas à Kauehi...
Poisson cru à la paumotu, coquillages du récif, pain coco en galettes et pain coco mouillé au lait de coco
Retour vers 15 heures à la pension.
Atelier de tressage avec Nanihi, experte non seulement en tressage mais danseuse dans un groupe de Tahiti.
Retour au bungalow. Dîner à 19 heures tous les jours en bout de ponton, un endroit ventilé et vraiment agréable.
Nous sommes 8 personnes dont quatre vaccinées COVID et allons oublier pendant ce séjour les contraintes habituelles subies ces derniers mois. Un vrai soulagement, même passager !
Dimanche 7 mars
Journée détente à la pension.
Lundi 8 mars
Sortie en bateau payante cette fois.
1 / Motu aux oiseaux
2 / Motu très spécial où pousse une rare plante endémique qui donne une fleur rouge magnifique. Ce n' était pas la période de floraison pour notre visite.
3 / Pêche à la traîne dans le lagon en longeant l' anneau corallien sur des kilomètres. Végétation dense et impénétrable. Pas ou peu de plages.
4 / Arrivée à la passe, sortie côté océan et exploration du tombant avec masque et tuba.
5 / Pêche en mer: nous allons ramener une douzaine de thons rouges ( dont un de 30 kgs ) et une grosse carangue. Pêche sportive, miraculeuse aussi ... car à peine les lignes sont-elles immergées que les poissons mordent.
6 / Retour à la pension et nettoyage des poissons, préparation des filets.
Le motu aux oiseaux
Platier aride ceinturant le motu côté récif
Noddis sur un banc de corail
Fou de Bassan aux pattes rouges
Fou aux pattes brunes
Accident mortel ( noddi ) par étranglement entre deux branches sèches
Sur le motu voisin, poussent de plus grands arbres. C 'est aussi un site de nidification des fous et des noddis. C 'est là que l' on trouve uniquement 3 exemplaires d'une plante à fleur rouge que l' on peut bouturer et mettre en post mais que l' on ne peut pas planter en terre ailleurs sur l' atoll ou un autre atoll...
Une histoire assez incroyable !
L' arbuste en question version très juvénile
La fameuse fleur très grosse pour un arbuste plutôt mince
Sur ce même motu, notre guide familial va nous trouver sous des palmes un exemplaire jeune de ' kaveu '. il y e a partout sur l' atoll et nous allons d'ailleurs déguster ce crabe lors de l' un de nos dîners.
Petit compte-rendu de cette escapade après le tri nécessaire des photos, toujours trop nombreuses...
Départ donc le jeudi 4 mars aux alentours de midi. Il faudra un peu plus de deux heures pour rejoindre Kauehi après une escale de 15 mn à Aratika, un atoll proche, faisant lui aussi partie de la commune de Fakarava.
Arrivée sur l' atoll de Aratika. Le lagon est constellé de taches blanches, des remontées de corail qui ne rendent pas la navigation très facile.
Descente sur Kauehi dont le lagon est immaculé. On aperçoit au loin la piste d'atterrissage.
Aérodrome de Kauehi qui se réveille une fois par semaine seulement ( une rotation alors qu'il y en avait deux il n' y a pas si longtemps ). Le personnel est payé environ 10.000 FCP par mois pour une prestation de deux heures par semaine.
Sur la piste de corail vers la pension, le Kauehi Lodge, située à 3 kms de l' aéroport. De l' autre côté, c'est une route bétonnée de 10 kms qui mène au village. et la piste contunieu au delà du village.
Le principal motu, sur lequel se trouvent pension, aérodrome et village de Tearavero, s'étire sur la moitié de l' anneau corallien, offrant ainsi une quarantaine de kms de piste aux véhicules.
A noter également que l' atoll de Kauehi a pratiquement autant de surface terrestre émergée que son immense voisin Fakarava. En revanche, son lagon est 4 fois moins grand...
Arrivée à la pension, installation , découverte des lieux ( ponton, salles de restaurant, cuisine, bord de plage ), rencontre avec les propriétaires des lieux, Colette et Jean-Claude, tout de suite très chaleureux, et d'autres membres de la famille qui résident au village mais viennent prêter main forte pour repas, service, entretien bateau, aide à la pêche, etc... La fille des propriétaires, Nanihi, charmante jeune femme, est également là avec son compagnon Yannis et leur petit garçon de 2 ans.
Increvable 504 plateau garée à l' aérodrome et qui survit aux mauvais traitements infligés aux véhicules sur un atoll.
La pension, construite sur un beau site en bord de lagon. Beau bois de qualité pour les bungalows et la pièce centrale, ponton très agréable pour échapper aux moustiques et aux nonos le soir entre 16 et 19 heures, d'excellents repas à base de poisson naturellement, une étendue d'eau devant la pension, propice à la baignade et à la natation, deux bateaux pour les sorties.
Un bémol qui concerne toutes les pensions ou presque des Tuamotu, surtout en saison chaude: il fait chaud voire étouffant dans les bungalows, et il y a ces fichus nonos qui piquent en fin de journée. Les propriétaires réfléchissent à climatiser les bungalows à l' énergie solaire comme cela se fait par exemple à Mataiva.
2 bungalows standard à 30000 FCP la nuitée en demi-pension.
2 bungalows Premium à 36000 FCP ( 300 euros ) la nuitée en demi-pension.
1 sortie journée au motu offerte pendant le séjour.
1 autre sortie ( que nous avons sollicitée ) à la journée facturée 15000 FCP pour deux personnes, un tarif tout à fait acceptable et honnête.
Devant la pension, une bonne dizaine de requins pointe-noire tournent sans cesse en attendant leur pitance ( reste de poissons ) comme des chiens dociles. Quand on nage, on en croise beaucoup, ainsi que des balistes, des poissons-perroquets...
Fin d'après-midi. On va suivre un sentier qui vient d'être dégagé sur 1 km et mène vers un petit chenal ou ' hoa ' qui se remplit ou se vide selon le moment de la journée.
Puis, de là, nous rejoignons la plage côté récif, sauvage comme au premier jour du monde et constellée de blocs de corail énormes datant d' une très lointaine période volcanique. Un deuxième récif, tout neuf et vivant, se trouve à 50 m du bord. on retrouve cette configuration de l' extérieur d'un atoll dans les autres atolls des Tuamotu, voire dans des îles hautes comme Rurutu par exemple. La région n' a pas toujours été calme, géologiquement parlant.
On est au nord de l' atoll au lieu-dit Tagaroaromatahara où se trouvent les vestiges d'un ancien phare, construit en pierres coralliennes à la fin des années 50 et qui servait uniquement de repère visuel le jour. Un phare identique a été construit à Fakarava cette fois équipé d'une lampe pour servir de repère la nuit.
Quelques autres phares du même genre ont été construits dans d'autres atolls proches. tous sous la houlette d'une dame-entrepreneur dynamique, Mme Taui Degage, nommée par le service de l' équipement de l' époque.
Aux environs du phare se situe un ' marae ' mentionné dans la légende dite du ' kaveu ' (ou crabe des cocotiers ) magique à une pince, et également lieu de manifestations des Tagaroafainu.
Vendredi 5 mars
Première journée complète. Nous allons prendre nos marques et occuper nos journées. Beaucoup de natation trois fois par jour , un peu de marche, un peu de lecture, et films et séries pré-enregistrés pour les fins d'après-midi et les soirées. Bien sur, il y aura deux journées entières en sortie lagon et extérieur.
Nous partons en camionnette au village qui frappe par la modestie, voire le côté sommaire de ses habitations, par la rareté des véhicules et par un sentiment de pauvreté que ne masque pas le soleil généreux des Tuamotu.
Petit retour en arrière : Kauehi a connu, aux heures de gloire de la perliculture, une éphémère et flamboyante prospérité. tout cela n' est désormais que souvenir : toutes les fermes ont mis la clé sous la porte et seule subsiste une activité de captage des naissains destinés à des fermes dans des atolls voisins. Les bénéfices de cette activité se sont évanouis depuis longtemps et la population a diminué d'environ 500 personnes pour retomber à 200 à 250 personnes au maximum.
Conséquence : même la coprahculture pâtit du manque de bras, et les cocoteraies - sauf quelques exceptions - sont vieillissantes voire abandonnées.
Le village est silencieux, et on y rencontre peu de monde en fin de matinée, quelques mères, grands-mères et enfants. Des chiens qui aboient, des cochons qui traînent accrochés à un long licou. Il reste un édifice pimpant au centre du village, l' église dédiée à Marc l' Evangéliste, décorée et entretenue avec soin par la population.
Petite digression : Kauehi fut convertie au catholicisme au 19ème siècle, dans le prolongement de la mission des Picpus ( de l' ordre des frères de Ploërmel en Bretagne ) aux Gambier et surtout dans la foulée de la conversion de l' île de Faaite en 1849, puis de l' implantation de la mission catholique à Fakarava et Ana'a en 1850.
La petite église dans le prolongement du quai bétonné servant à débarquer les marchandises du bateau-cargo ravitailleur. Celui-ci est arrivé le 10 mars après un mois et demie d'absence, suite à des pannes de moteur... C 'est cela aussi la vie des îles !!! Rien n' est jamais sur !
Le dispensaire
Les villageois ont ramassé des centaines de bouées abandonnées souvent au milieu du lagon par les propriétaires de fermes perlières.
Plage du village
Retour à la pension et après-midi à la pension.
Le temps est magnifique, l' eau claire et chaude. Pas de vent, pas de lagon qui clapote. Le soleil darde ses rayons... ce sont les Tuamotu !
Le ' Kaveu ' ou crabe des cocotiers, un arthropode iconique des Tuamotu ( et d'autres régions de l' Indo-Pacifique )
Le crabe des cocotiers adulte - en latin Birgus Latro - fait partie, avec les bernard-l'ermite, de la famille des pagures ( Paguroidea en latin ). Il mesure une quarantaine de centimètres avec une envergure, pinces écartées, de 80 cm voire 1 mètre et pèse entre un et trois kilos. Des spécimens beaucoup plus gros et plus lourds ( 15 à 17 kgs ) ont été trouvés dans d'autres contrées dont les îles tropicales du sud du Japon.
Cet animal a une vie uniquement marine les trois premières années de sa vie : la femelle pond à marée haute 50 à 150.000 oeufs qui se transforment en larves puis en petits crustacés se réfugiant dans des coquilles d'emprunt de plus en plus grandes au fur et à mesure de leur croissance. A l' âge de 3 ans, ils s'installent sur terre, perdent leur dernière coquille; leur carapace durcit et leurs pinces prennent de la force. C' est alors qu' ils ne peuvent plus respirer sous l' eau.
Leur espérance de vie est d'environ 30 ans s'ils ne rencontrent pas l' un ou l' autre de leurs prédateurs : une minuscule fourmi ou l' homme qui le chasse pour sa chair succulente.
Le ' kaveu ' est discret et craintif, se dissimulant sous les blocs de corail ou sous des troncs d'arbres, dans d'épais fourrés ou dans des terriers sous des amas de palmes de cocotiers ou entre les racines des arbres.
On les chasse la nuit quand eux-mêmes sont en chasse, à la recherche de noix de coco qu'ils débourrent et ouvrent facilement grâce à leurs pinces énormes.
Ils se distinguent des autres crabes par leur poche ventrale, dont le contenu fait de fine graisse de coco est considéré comme le foie gras des Tuamotu. On peut consommer cette graisse en soupe miso comme la préparent les chefs japonais. Le reste du corps, coffre et pinces, se consomme comme on peut le faire avec d'autre crabes, avec une mayonnaise par exemple.
A noter enfin que son nom latin ' latro ' est proche du mot espagnol ' ladron ' et des mots français ' larron ' et ' larcin ' : le crabe des cocotiers est en effet un voleur de nourriture, y compris au plus proche des maison !
Un petit paragraphe sur les bernard-l'ermite rouges ( mais parfois aussi grenat ou bruns )
, des pagures également plus petits, non comestibles pour l' homme mais utilisés pour appâter les poissons comme le mérou par exemple.
Le bernard-l'ermite est essentiel à l' écosystème des atolls dont il est l' éboueur en chef, se délectant côté océan à marée basse de toutes les substances organiques rejetées par la mer, et traquant tout ce qu'il est possible de manger, mort ou vif, dans la brousse, les cocoteraies ou sur les plages des lagons et des motu.
Merci pour la mise en bouche.
C'est effectivement une chance pour l'atoll d'avoir un bon lodge, ça n'est de loin pas le cas de toutes les îles.
Je me réjouis de découvrir la suite 😋, verrez vous des tortues par exemple 😃
Bon voyage