Ce voyage interne à la Polynésie est notre première sortie de Tahiti depuis plus de 6 mois.
C' est grâce au E-Salon du Tourisme du mois de février et à ses tarifs alléchants ( 50% du billet d'avion ) que nous nous sommes décidés à partir à la découverte d'un autre atoll des Tuamotu, chacun d'entre eux étant spécial et unique, différent de ses voisins, que ce soit par son histoire, son peuplement, ses coutumes, sa flore et sa faune.
On a du mal à l' imaginer et pourtant, c'est ainsi. Bien sur, il y a des points communs à tous ces atolls, mais il y a toujours un petit quelque chose qui permet de distinguer l' un de l' autre ! Cap au nord-est donc dans quelques jours.
Je profite de ce we pour faire une présentation en externe de l' atoll.
UN PEU DE GEOLOGIE
Kauehi est l' excroissance corallienne du sommet d'un mont volcanique sous-marin, mesurant 1535 mètres à partir du plancher océanique et vieux d'environ 55 millions d'années.
UN PEU DE GEOGRAPHIE
Kauehi - ou Putake en langue paumotu - est situé au plus proche de l' atoll de Taraka, à 45 kms au nord-est de Fakarava et à 460 kms de Tahiti. C' est un atoll de forme ovoïde, d'une longueur de 24 kms sur une largeur de 18 kms pour une surface de terres émergées de 15 km2. Le lagon est grand ( 320 km2 ) et accessible par une large passe navigable dite passe Arikitamiro ( de 200 mètres de large et de 9 mètres de profondeur )
La passe, le chenal et l' arrivée au village ( jetée bétonnée ) par le lagon sont balisés de jour et de nuit.
L' atoll fait partie d'une vaste réserve biosphérique nommée comme telle par l' UNESCO, le classement ayant été renouvelé plusieurs fois depuis sa création, dont les dernières fois en 2006 et en 2017.
Je vous renvoie au post précédent pour plus de détails.
En 2017, l' atoll comptait environ 550 habitants, la plupart regroupé dans le village de Tearavero situé sur le grand motu principal à l' est. Dans le village, les bâtiments principaux ont été construits à la chaux corallienne ( pour le scellement des blocs de corail servant à monter les murs ) selon les méthodes traditionnelles en cours au 19ème siècle.
Deux bâtiments sont remarquables : l' église dédiée à Saint-Marc l' Evangéliste ( ou Mareko Peata ) et la Mairie, anciennement chefferie érigée en 1884, modernisée au début du 20ème siècle, surélevée de 1 mètre 20, et qui a servi de refuge à toute la population lors des cyclones du siècle dernier ( 1903,1906 et 1983 ) et des tempêtes tropicales ou houles déferlantes plus récentes.
L' atoll dispose d'un aérodrome desservi une fois par semaine par Air Tahiti depuis 2001 et accueille environ 2000 visiteurs par an.
On trouve des traces de fosses à culture - ou ' maite ' en tahitien - qui témoignent d'une ancienne activité de culture parfois extensive dans les atolls des Tuamotu. Ces fosses à culture ont été introduites dans tous les atolls des Tuamotu-nord par les féroces et redoutés ( mais très organisés... ) guerriers ' Parata ' originaires de l' atoll de Ana'a dans les Tuamotu-centre / Gambier qui, au fil du 17ème siècle et de la première moitié du 18ème siècle ( en fait jusqu'à l' arrivée des missionnaires ) ont conquis les uns après les autres, les atolls du nord de l' archipel, transformant les vaincus en esclaves travaillant la terre dans ces fameuses fosses à culture, mais aussi les tuant pour leur consommation ordinaire.
Je vous renvoie à mon post sur Ana'a dans VF pour plus de détails.
Comment fonctionnait la fosse à culture ? il y fallait des travailleurs acharnés pour creuser le sol corallien jusque' à atteindre la lentille d'eau saumâtre. Dans une fosse de 10 mètres sur 5 mètres environ, on mélangeait de la terre végétale à de la terre sableuse, l' ensemble étant enrichi de fragments de plantes et de feuilles appropriées pour constituer un riche compost. Rien que de très classique, finalement, mais une mini-révolution sur un atoll corallien plutôt aride et peu fertile.
Et là, on cultivait, indépendamment d'une fosse à l' autre, des tubercules ou des plantes alimentaires telles le ' taro ' ou le ' ape ', et arbres fruitiers comme des bananiers ou des papayers.
Les cocotiers étaient plantés autour des fosses pour faire de l' ombre, mais ont trop vite prospéré, en prenant la place des cultures vivrières, elles-mêmes finalement délaissées car nécessitant une main-d'oeuvre- importante et difficile à trouver sur un atoll, sauf à avoir des esclaves par centaines comme les 'Parata ' de Ana'a !
UN PEU D'HISTOIRE
L' atoll, comme ses voisins, a été jadis habité ponctuellement par des Polynésiens venus pêcher la perles, puis sans doute visité par des marchands de perles, d'autant plus que la passe très accessible de l' atoll en faisait un port de mouillage sur et agréable.
Le premier Européen à avoir foulé le sol de l' atoll fut le capitaine du HMS BEAGLE, l' anglais Robert Fitz-Roy le 13 novembre 1835. Quelques années plus tard, ce fut une expédition scientifique américaine menée par le capitaine de vaisseau Charles Wilkes qui débarqua aussi sur l' atoll qui fut nommé Vincennes, d'après le nom du navire.
FAUNE
L' atoll est classé en tant que conservatoire biologique de haut niveau. il accueille une population endémique de Chevaliers ( ou Bécasseaux ) des Tuamotu, oiseaux migrateurs de l' hémisphère nord, dit limicoles car vivant principalement - ici en Polynésie - sur les bords de lagons, de motu et sur les récifs émergés.
Le retour au Canada ou en Alaska ne se fait, pour ces oiseaux, que la seconde année de leur vie, le voyage étant épuisant malgré quelques étapes.
Kauehi est aussi un site important de ponte pour les tortues marines.
On y chasse la nuit - en protégeant la ressource qui n' est pas inépuisable - le crabe de cocotier, un mets délicat.
A noter que le ' kaveka ' ( une sorte de grosse hirondelle de mer ) rencontrée sur deux motu de l' atoll est toujours consommé, ainsi que ses oeufs pondus à même le sol corallien. Autrefois la gestion des prélèvements sur nids et de la distribution dépendait uniquement d' un comité des anciens, respecté par tous ( ou ' tomite toohitu ' ).
Désormais ce comité n' existe plus, et il s' agit plus de braconnage que d' autre chose...
Comme pour les tortues ici et ailleurs, il sera difficile de faire comprendre à la population dans son ensemble que la consommation d'hirondelles de mer et de leurs oeufs n' est plus d'actualité à l' époque des goélettes apportant régulièrement la viande congelée de Nouvelle Zélande. Mais ce genre de tradition ne disparait pas si facilement, hélas !
Voyons maintenant les arguments à la décharge des Paumotu : le chien, l' hirondelle de mer ou la tortue, ainsi que leurs oeufs, sont hautement protéinés. Difficile de ne pas se servir sur place quand on réside dans une île perdue au milieu du Pacifique, non reliée à Tahiti par voie aérienne, ne voyant la goélette que 3 ou 4 fois par an, et ne pouvant compter que sur les ressources locales. Et puis pour acheter la viande importée, il faut de l' argent, une denrée rare sur un petit atoll. Consommer local est donc imparable !
UNE AUTRE COUTUME D'ANTAN
Il s'agit ici de l' ancien cimetière du village de Tearavero où les tombes sont disposées d'une façon tout à fait originale..
Il est partagé en 4 zones closes bien distinctes:
1 / les hommes, mariés ou célibataires
2 / Les femmes, mariés ou célibataires
3 / les enfants morts-nés ou non baptisés à la naissance
4 / Les pestiférés, concubins ou homosexuels.
Le plus extraordinaire, c'est que cette ségrégation existe toujours aujourd'hui !
En l' absence permanente d'un curé, c 'est un diacre qui officie lors des enterrements. Il a demandé à ses paroissiens de revoir leur manière d'enterrer leurs morts, mais en vain.
On continue comme par le passé !
Voilà j' en ai fini avec cette longue introduction à cet atoll après les photos jointes.
Départ jeudi 4 mars.
Je reprendrai ce post le moment venu, pendant le séjour, j' espère, et à mon retour à Tahiti car la connexion wi-fi n' est pas toujours géniale dans les îles éloignées.
Logement au Kauehi Lodge, donné comme l' un des 3 meilleurs des Tuamotu. C 'est assez inespéré, non, sur un petit atoll comme Kauehi....?

Vue satellitaire de Kauehi

Kauehi en 1861, dessin d'un peintre de la Marine britannique.

Chevalier des Tuamotu : adulte

le même : jeune adulte ( 1 an )

Le même : juvénile ( bagué )

kaveka noir

Oeufs de Kaveka

Mairie de Kauehi

Ancienne fresque conservée après dernière restauration du bâtiment
PS : Paumotu et Marquisiens restent dans leur très grand majorité pro-français dans l' âme. Ils savent ce que leur coûterait l' indépendance de la Polynésie (ou Tahiti Nui ) qui se replierait sur les Îles du Vent et certaines des Îles sous le Vent ( Raiatea et Bora-Bora ) et larguerait allègrement les autres archipels...
Ceux de nos ministres qui se risquent à visiter atolls ou îles hautes marquisiennes reçoivent un accueil inoubliable qui interloque à Paris... on nous aime tant que cela ???

Dessin d'enfant de Kauehi représentant le motu aux oiseaux

Dessin d' enfant de Kauehi représentant le village

Kauehi sur un motu, le mythe polynésien
Hello Denis,
Tes photos de vos repas sont de la provocation pour nous qui aimons la gastronomie des îles ! 😋
Merci beaucoup de nous avoir fait découvrir cet atoll en partageant avec nous votre voyage.
J'ai montré les photos à Valérie qui a conclu par un "faut qu'on y retourne !".
Dans l'hypothèse d'un retour en Polynésie, je pense qu'on voudra revenir dans un atoll des Tuamotus. Vous qui en avez vu un bon nombre, le ou lesquels conseilleriez-vous ?.
La possibilité de pouvoir y faire de la plongée sous-marine est un plus.
Merciiii 😊