je vous invite, si cela vous intéresse en détail, à lire mon carnet sur les Australes, et plus particulièrement sur Tubuai sur le site Voyage Forum ( actuellement en arrêt temporaire, espérons-le ) dans lequel je décris les errances de la Bounty, surtout après la mutinerie ayant eu lieu à bord et qui rendait l' équipage vulnérable à toute recherche poussée de la marine anglaise. les mutins risquaient la pendaison haut et court après cet acte grave d'insubordination et leur but fut de gagner du temps, se cacher dans une île quelque part en attendant que la situation soit moins dangereuse pour eux.
Au départ le navire devait rejoindre Tahiti, mais ce projet va être modifié selon une nouvelle stratégie : Tubuai, située alors à la limite des terres connues, et difficile d'accès à cause de passes étroites et courtes, sera choisie en connaissance de cause. et quand il sera question de repartir à un moment donné, ce ne sera pas cap au nord-ouest vers Tahiti, un mouillage trop dangereux ( à cause des patrouilles des marines britannique mais aussi française ) mais cap à l' est vers Pitcairn.
Christian Fletcher, mutin en chef, connaissait déjà Tubuai et donc il lui parait judicieux de venir s' y installer durablement après avoir fait de larges provisions à Tahiti : cochons, chèvres, poules... Tubuai fournira tout ce qui est fruits, légumes et tubercules du genre igname ou taro. Le récif proche fournira poissons, le lagon les tortues. Les rivières qui dévalent des sommets donnent en quantité anguilles, chevrettes. L' île est densément peuplée à l' époque, d'environ 3000 habitants, une population majoritairement jeune et bien bâtie, plus robuste et d'un aspect rendu plus sauvage par l' utilisation d'huile et de curcuma ( le ' rea tahiti ' / turmeric en anglais ) pour colorer les tissus mais aussi leur peau.
Cheveux et barbes sont portés et taillés de différentes façons, Tubuai est une île de guerriers à ne pas sous-estimer.
Fletcher - qui manque de flair, d' habileté et de psychologie - va faire des erreurs d'appréciation, par exemple en débarquant du bétail qui va ravager les cultures indigènes, sur l' île principale mais aussi sur les ' motu ', et se mettre rapidement à dos une population plutôt bienveillante au départ.
L' équipage a acquis un terrain auprès du roi Taroatoa en échange de plumes rouges ( très convoitées car utilisées pour la confection de manteaux de plumes royaux ) pour au départ y construire des cases d'habitation. Mais la tension devient telle que le terrain est transformé en fortin ( le fameux fort George ) de 100 mètres de côté avec des tours de guet à chaque coin où l' équipage travaille d'arrache-pied. Le temps presse d'autant que les vivres manquent et que la population autochtone rechigne à vendre quoi que ce soit ou à travailler à un projet qui ne les concerne pas et qui n' arrange pas leurs affaires. Les femmes font de la provocation dans la journée, mais s'esquivent dès la nuit tombante.
Les marins sont d'autant plus sous pression que les chefs de Tubuai ont pu secrètement échanger avec les autorités tahitiennes qui ont reçu le navire quelques mois auparavant : plus question de faire ami-ami, mais plutôt de trucider tous les marins en attaquant leur camp retranché, en guise de vengeance après les exactions et meurtres d'insulaires commis au premier passage.
Ce qui doit arriver arrive : le fort est attaqué, les marins résistent, quelques-uns sont tués mais c'est l' hécatombe côté guerriers Tubuai, avec 67 morts.
La survie de la colonie est clairement menacée, les marins craignent désormais pour leur vie, la population est sur le pied de guerre, les tambours résonnent de partout, les nuits sont éprouvantes. L' équipage vote en majorité pour un départ précipité, en compagnie de 17 polynésiens dont plusieurs femmes. Le Bounty va voguer vers son destin, l'îlot de Pitcairn au pied des falaises duquel il sera brûlé et coulé.
Après la mort des derniers membres d'équipage et des hommes polynésiens, pour raison de maladies diverses, Fletcher se retrouvera seul avec un harem de Polynésiennes qui lui donneront une ribambelle impressionnante d'enfants. Leurs descendants ( une cinquantaine de personnes ) résident toujours à Pitcairn à ce jour.


Le fort George dont il ne reste rien actuellement, la ligne de côte ayant reculé de plus de 100 mètres depuis l' époque de sa construction.
Sublime Tetiaroa : mes photos