Ci-après un article qui vous intéressera tous car il concerne l' histoire plus troublée qu'il n' y parait de la Nouvelle Zélande et les exactions sanglantes des Maoris qui rappellent volontiers leur statut de colonisés par les Britanniques, mais qui, avant l' arrivée de ces derniers, furent eux-mêmes des colonisateurs implacables et cruels.
Comme quoi les choses ne sont jamais ni blanches ni noires, mais plutôt dans les nuances de gris !
1835 : Arrêt de mort pour les Moriori
On a longtemps cru que les Moriori étaient venus directement de l’actuelle Polynésie française ; en réalité tout indique qu’ils étaient originaires de la Nouvelle-Zélande aux alentours de l’an 1500. Tahiti, le 12 février 2021 - L’histoire de la colonisation du Pacifique Sud par les Européens est riche de nombreux événements souvent tragiques, féroces et cruels, mais il en est un qui est unique, car il porte sur la colonisation non par des Européens, mais par des Polynésiens, les Maori de Nouvelle-Zélande, d’un autre petit peuple, les Moriori, habitants aborigènes de l’archipel des îles Chatham situées à 800 km à l'est des côtes de la Nouvelle-Zélande (à la latitude de Christchurch). Une colonisation d’une brutalité inouïe qui a abouti, cannibalisme forcené aidant, à l'élimination quasi complète d'une population n’ayant qu’un seul tort, celui de refuser toute forme de violence, même pour se défendre. Le peuple Moriori vécut isolé du reste du monde pendant une période difficile à définir ; ces Polynésiens, ethniquement parlant, venaient très probablement de la Nouvelle-Zélande elle-même et seraient arrivés sur ce petit groupe d'îles battues par les vents froids du sud un peu avant 1 500 ap. J.C. Moriori est une transformation du mot Maori, qui désigne les indigènes vivant en Nouvelle-Zélande. Les Moriori n'ont jamais été très nombreux : guère plus de deux mille, sachant que les conditions de vie sur leurs îles étant très précaires, elles ne permettaient pas à une population nombreuse d'y prospérer. On rapporte d'ailleurs que certains enfants mâles étaient régulièrement castrés voire même tués à leur naissance pour éviter, justement, tout risque de surpopulation, les ressources locales (poissons et quelques plantes) étant limitées. Au début de leur histoire, à l'image des Maori, les Moriori étaient très belliqueux, mais un de leurs prestigieux chefs, Nunuku Whenua, imposa à tous la paix, inculquant à son peuple l'idée pacifiste très en avance sur son temps que les conflits devaient se régler de toutes les manières possibles, sauf par la violence. La règle édictée par Nunuku s'appliquait à tous et à toutes et dans les pires cas, si un conflit ne pouvait se régler autrement que par un affrontement, celui-ci se limitait à un duel entre les protagonistes. Or, c'est cette règle de Nunuku qui conduisit son peuple à sa perte plus tard. Qui était donc ce fameux Nunuku dont le mana fut tel qu’il imposa une loi destructrice pour son peuple ? A vrai dire, on ne sait rien de précis sur lui sinon que Nunuku Whenua était un chef moriori ayant vécu au XVIe siècle aux Chatham. A la tête de la petite tribu des Hamata, après un conflit avec certains de ses voisins, il aurait vaincu ses rivaux, mais à la façon de Pyrrhus, c’est-à-dire en ne gagnant rien dans cette bataille sinon un peu moins de morts que ses adversaires. Pour lui, une évidence s’imposa : quel que soit le motif d’un conflit, aucune guerre n’était admissible, aucune exécution capitale acceptable et par voie de conséquence aucun acte de cannibalisme n’était justifié. Condamnés à vivre sur un archipel peu accueillant de seulement 966 km2 (Tahiti mesure 1045 km2), les Moriori devaient intégrer le fait que la violence ne ferait désormais plus partie de leur vie. C'est à partir de leur découverte par William R. Broughton le 29 novembre 1791 que le sort de ces îles et de leur population prit une tournure plus délicate, car le HSM Chatham, qui donna son nom à l'archipel, amenait avec lui des maladies inconnues comme la grippe, qui s'avéra mortelle. D'autant que dans le sillage du Chatham arrivèrent des baleiniers et des chasseurs de phoques, équipages qui n'étaient pas exempts de toutes sortes d’affections, bien au contraire. Dans les années 1830, sur 2 000 habitants, il n'en restait plus que 1 600 estime-t-on d'après les recensements partiels alors effectués. Ces mauvaises influences extérieures n'étaient rien en comparaison de ce qui attendaient les Moriori : à bord des baleiniers notamment, des Maori étaient fréquemment embarqués, souvent de gré, parfois de force, pour renforcer les équipages ; or, ces Maori qui découvrirent les Chatham furent très étonnés de constater que les Moriori vouaient un véritable culte à la non violence ; ils comprirent vite tout le parti qu'ils pouvaient tirer de cette information capitale ; même si le comportement des marins était condamnable, même si ceux-ci commettaient des fautes méritant châtiment, les Moriori ne répondaient jamais autrement que par la tolérance et la résignation, loi de Nunuku oblige. De retour dans leurs tribus, les Maori ayant fait escale aux Chatham s'empressèrent de raconter à leurs chefs que pas si loin que cela des côtes, se trouvaient des îles à conquérir, conquête qui s'annonçait d'autant plus facile que les envahisseurs trouveraient en face d'eux des gens paisibles, incapables de se battre et refusant toute violence. Les Maori, à l'époque, avaient déjà commencé à se hasarder jusqu'aux Samoa et à Norfolk pour coloniser de nouvelles terres et la perspective de s'emparer facilement des Chatham leur parut opportune, car sans risque. Début 1835, une invasion guerrière fut planifiée et elle se fit, à partir de deux tribus, les Ngati Mutunga et les Ngati Tama (tous de la région au nord de Wellington). Le 19 novembre 1835, le brick Lord Rodney arriva aux Chatham avec 500 guerriers Maori armés de leur traditionnel arsenal, mais aussi de pistolets et de mousquets. Le bateau avait dans ses cales plusieurs dizaines de tonnes de patates douces à consommer, mais aussi à planter pour subvenir aux besoins des conquérants décidés à rester. Le 5 décembre 1835, un autre navire convoya 400 guerriers Maori. Le ton fut très vite donné ; l'invasion serait sanglante. La première victime aurait été une petite fille de 12 ans, attrapée, tuée, écorchée et dont les restes de la carcasse et la chair auraient été suspendus à un poteau. Le signal était clair, les Maori étaient venus pour tuer les Moriori et accessoirement manger ceux qu'ils vaincraient. Aucun tabu ne fut respecté ; aucune propriété, aucune enceinte sacrée, aucun lieu de vie qui ne fut envahi et où les massacres les plus abominables eurent lieu sur des habitants sans défense et qui, de plus, refusaient de se battre. En l'absence de viande abondante sur l'île, les Moriori devinrent à la fois les esclaves et le bétail des Maoris qui dévorèrent impitoyablement tous les vaincus qu'ils pouvaient tuer, gardant les autres en réserve pour en faire leurs domestiques. Devant l'ampleur de la catastrophe qui s'abattait sur les Chatham, une réunion des chefs Moriori eut tout de même lieu sur le site appelé Te Awapatiki ; tous étaient conscients que face à la brutalité des Maori, face à leur férocité et à leur sauvagerie, face au fait qu'ils dévoraient tous les Morioris qu'ils tuaient, rester sans rien faire équivaudrait à se faire massacrer. Et pourtant, alors qu'ils étaient pratiquement à deux contre un, les Morioris décidèrent de ne pas se battre, de ne pas se défendre, de ne pas repousser à la mer les colonisateurs. La règle de Nunuku n'était pas seulement une loi, ce devait être une obligation morale. Un survivant Moriori témoigna plus tard que, dès lors, les Maori les considérèrent comme étant tous du bétail : hommes femmes, enfants, les Maori ne faisaient pas de détail, ils tuaient et mangeaient les Moriori quand bon leur semblait. Un Maori, expliqua plus tardivement que dans leur esprit, ils prenaient pleine possession de ces terres et qu'en accord avec leurs traditions, ils étaient en droit de capturer et de disposer à leur guise de toute la population indigène, y compris pour la manger. Personne ne devait en réchapper… L'invasion des Chatham terminée, tout le territoire conquis, les Maoris conservèrent quelques centaines d'esclaves Moriori dont certains furent envoyés en Nouvelle-Zélande dans les tribus, toujours comme esclaves. Il leur était, bien entendu, interdit, sauf exception, de fonder des familles, de procréer et de vivre autrement que comme des animaux soumis aux caprices de leurs maîtres qui les passaient volontiers au four quand ils avaient une petite faim. La langue Moriori fut interdite, la culture Moriori effacée et l'on estime aujourd'hui qu'environ trois cents personnes au moins furent victimes de l'anthropophagie féroce et folle des Maori durant cette courte période de prise de possession des îles. Le génocide se poursuivit plus tard, notamment par le parcage sur la plage de femmes et enfants, dans des enclos où ils mourraient de faim, de froid et de soif. Enfin, dans le souci de détruire toute trace des cultes anciens, ils forcèrent les Moriori à uriner et déféquer sur les lieux qui leur étaient sacrés, leurs marae. Seules quelques femmes Moriori parvinrent à se marier avec des Européens de passage ou des Maori. En 1862, il restait moins d’une centaine de Moriori encore vivants, sur les deux mille personnes composant, en 1834, cette petite ethnie pacifique. Tommy Solomon, qui passait pour être le dernier Moriori de sang pur, mourut en 1933, mais heureusement, plusieurs milliers de Morioris métissés sont encore vivants de nos jours. La culture Moriori renaît petit à petit de ses cendres, et, en 2005, la promesse de vivre en paix a été refaite solennellement par tous ceux qui ont du sang Moriori dans les veines, sur le marae Kopinga, aux îles Chatham. Le gouvernement néo-zélandais, qui plus est, a reconnu ce petit peuple dans une partie de ses droits même si ce génocide cannibale ne sera jamais effacé des mémoires… Les îles Chatham furent le théâtre de ce qui est sans doute le seul génocide cannibale connu dans l'histoire moderne. Les vulnérables et malheureux Moriori, aux Chatham, étaient certes des cibles à abattre, mais aussi et surtout des matières premières indispensables au bon moral de leurs maîtres, les Maoris, venus de Nouvelle-Zélande en 1835, cannibales invétérés, bien décidés à ce que leur raison, celle du plus fort, l’emporte sur toute autre considération. On le sait, non violents, pacifistes convaincus, les Moriori furent des proies de choix pour leurs envahisseurs qui n’eurent de cesse de les humilier et de les éliminer, et nous avons retrouvé un récit de ce qui fut sans doute l’un des derniers repas dont les Moriori furent les victimes. C'était en 1844, mais il faut revenir en arrière de quelques mois pour mieux comprendre l'origine de ce récit. Si les missionnaires anglais furent très actifs dans le Pacifique, et les Français un peu moins, les Allemands ne furent pas absents de ce vaste océan qu'il fallait convertir à la vraie foi et qu’il fallait aussi coloniser pour des raisons économiques ou géostratégiques. D'où l'envoi, depuis Berlin, de missions dans des terres où la parole du “vrai dieu” n'avait pas été répandue et où les intérêts allemands n’étaient pas représentés et à plus forte raison défendus. Ce fut le cas en 1842, quand cinq missionnaires luthériens allemands furent envoyés dans le Pacifique Sud ; parvenus à Nelson, en Nouvelle-Zélande, ils constatèrent que d'autres missionnaires avaient déjà commencé le travail et ils décidèrent d'aller évangéliser les îles Chatham dont on ne savait que peu de choses, sinon qu'il s'y passait des événements terribles, comme avaient pu en témoigner les baleiniers en escale. Les cinq missionnaires allemands débarquèrent dans l’archipel oublié du monde le 20 février 1843 ; ils y découvrirent un millier de Maori violents et sanguinaires, et environ cent cinquante à deux cents Moriori soumis aux Maori. A l'évidence, il y avait sur cette terre de péché beaucoup de travail pour des missionnaires qui n'étaient pas paresseux. Mais pour se faire accepter et pour ensuite faire progresser la foi, ils comprirent qu'ils devaient se rendre utiles, indispensables mêmes aux yeux des indigènes : l'un des religieux était charpentier, un autre peintre, un autre forgeron, un autre tonnelier et le dernier fut désigné maître d'école et professeur de musique. Les missionnaires comprirent aussi très vite que les Maori avaient entendu parler de ces étranges prêcheurs, auprès desquels ils pouvaient se fournir en toutes sortes d'objets utiles et que leur présence n’était pas si inattendue que cela, d’autres sévissant déjà sur leur île d’origine. Les Allemands, pragmatiques, mirent de suite un frein à la volonté des Maoris de les piller : oui à des échanges, non à des cadeaux et de toutes les façons, le christianisme qu'ils devaient enseigner n'avait rien à voir avec le commerce de bouts de ferraille. Les Maoris, pour faire céder les cinq Européens, firent alors monter les enchères dans la fourniture de produits vivriers, espérant affamer leurs visiteurs et les contraindre à plus de docilité et de soumission, mais les Allemands avaient des vivres et de la ressource. J.G. Engst, le plus âgé, intégra rapidement dans sa vision de ce nouveau monde à évangéliser que la stratégie des indigènes païens était de les affamer. Subir, céder, s’avouer vaincu, c'était assurément mal connaître les Allemands, qui avaient des pommes de terre avec eux et qui, très vite, sur le lopin de terre où ils s'étaient installés, eurent largement de quoi satisfaire leurs besoins alimentaires de base. Mieux même, les Allemands furent rapidement en mesure d'acheter un petit voilier en Nouvelle-Zélande pour assurer leurs liaisons avec Auckland et commercer ; ainsi, lors des ruées vers l'or qui se succédèrent en Australie furent-ils capables d'exporter mille tonnes de pommes de terre vers la Nouvelle-Zélande, puis vers l'Australie. Un chiffre qui peut paraître extravagant, mais qui montre bien quelle énergie ils déployèrent pour asseoir leur présence et ne dépendre très vite de personne, ni des Maori, ni de la charité des chrétiens de Sydney, ni même du bon vouloir de leur maison mère à Berlin. Trois ans après leur installation réussie, leur société missionnaire, malgré tout généreuse, leur envoya un somptueux cadeau, en l’occurrence trois femmes pour qu'ils “se réconcilient avec leurs conditions”. M. Engst et un autre missionnaire restèrent célibataires, mais se montrèrent satisfaits de leur sort, les trois autres ne se faisant pas prier pour se “réconcilier avec leur condition” comme le leur demandaient leurs supérieurs. Il y a des ordres qui ne se refusent pas… Evidemment, très vite, la mission allemande prit une forte ascendance sur les Chatham et le premier travail des missionnaires, civiliser et évangéliser les Maoris comme les derniers Moriori, ne cessa jamais jusqu'à la conversion de tous. Or, parmi les soucis des missionnaires, les pratiques de leurs concitoyens encore réfractaires à la Bible, les heurtaient énormément, notamment le cannibalisme qui s’exerçait aux dépens des Moriori. Ils entreprirent donc leur éducation avec ferveur, dans l'espoir de leur faire abandonner l'anthropophagie au plus vite, ce qu'ils parvinrent à faire assez rapidement. Néanmoins, en 1844, M. Engst se rendit à Ocean Bay et, devant la maison de palabres d'un vieux chef, il tomba en arrêt devant un tas de crânes qui lui semblèrent très récents. Ils avaient été mis à blanchir au soleil, mais leur fraîcheur interpella le missionnaire. Celui-ci demanda des explications qui lui furent fournies par un évadé du bagne d'Australie, qui vivait alors aux côtés du chef Maori. Celui-ci lui raconta donc ce qui avait abouti à la présence de ces crânes ; peu de temps avant la venue de M. Engst à Ocean Bay, le chef avait réuni ses esclaves Moriori pour leur faire construire un grand four dans la terre, rempli de bois et de pierres à chauffer. Quand tout fut prêt, le chef vint inspecter le travail et massacra à coups de casse-têtes neuf de ses Moriori. Aux survivants, il donna l'ordre de tout simplement cuire les corps de leurs frères et parents. Tout le village maori reçut une invitation du chef et un grand banquet fut organisé pour l'occasion. Selon le missionnaire, ce dramatique massacre suivi d'un repas cannibale fut sans doute le dernier de ce type qui eut lieu aux Chatham, puisque Engst se chargea de convaincre le chef de l'immoralité de cette pratique. Celui-ci, s’il ne justifia pas clairement son geste, entendait probablement procéder à un dernier repas festif de chair humaine, alors que la présence et la pression des missionnaires lui avaient sans doute fait craindre que l’anthropophagie ne fasse bientôt partie du passé… Le petit archipel des îles Chatham se trouve environ à 800 km à l’est de la ville de Christchurch en Nouvelle-Zélande, par quasiment 44° de latitude sud. L’ensemble des terres émergées représente 966 km2, deux îles se distinguant par leur surface : la plus grande, Chatham (Reroku ou Wharekauri en Maori) et Pitt (Rangiauria). Le principal village, Waitangi, se trouve sur Chatham. Routes, aéroport et cultures se trouvent concentrés sur Chatham qui culmine à 299 m au-dessus du niveau de la mer. Le climat subpolaire, océanique et pluvieux permet à de petits cours d’eau de se maintenir, tandis que des lacs parsèment la grande île. Avant l’invasion par les Maori, les Moriori étaient divisés en neuf tribus : les Hamata, Wheteina, Eitara, Etiao, Harua, Makao, Matanga, Poutama et Rauru. Les chefs ne l’étaient pas de façon héréditaire, mais étaient choisis en fonction de leurs capacités à bien gouverner. Les Maori, on l’a vu, se sont comportés comme des bouchers sur cet archipel de Chatham peuplé avant leur arrivée par près de deux mille personnes complètement pacifiques. Cette colonisation suivie d’un véritable génocide aurait dû amener les Maoris à un peu de compassion. Que nenni ! Si en 1863, les autorités néo-zélandaises vinrent rendre leur liberté aux derniers Moriori, les clans Ngati Mutunga et Ngati Tama refusèrent catégoriquement de restituer les terres confisquées au peuple premier, la justice britannique déclarant officiellement en 1870 que 97,3% des terres appartenaient effectivement aux Maori et non aux Moriori dépossédés. Cette arrogance des Maori envers les Moriori n’a pas cessé depuis : en 1994, les Moriori déposèrent un nouveau recours devant le tribunal de Waitangi, demandant que leur soit reconnu le statut de peuple indigène. En 2001 seulement, le tribunal finit par leur donner raison ; ils obtinrent un droit de regard sur l’exploitation des ressources marines autour de leur archipel, mais en revanche, les Maori, arc-boutés sur leurs positions de colonialistes et d’envahisseurs, refusèrent tout acte de repentance. Finalement, le 14 février 2020, la Nouvelle-Zélande émit une demande formelle de pardon pour les souffrances endurées et versa aux Moriori une indemnité de 18 millions de dollars NZ en compensation. Enfin les Moriori se virent attribuer les terres qui appartenaient jusqu’alors au gouvernement néo-zélandais –mais pas un mètre carré des terres détenues le plus illégalement du monde par les Maori. Ceux-ci ne veulent toujours rien céder et surtout pas reconnaître leurs torts. Pire même, entre 2001 et 2020, ces derniers multiplièrent les actes d’incivilité envers la communauté moriorie, saccageant et vandalisant à qui mieux-mieux les sites sacrés des derniers Moriori. On voit que si les Maori se posent volontiers, aujourd’hui encore, en victimes de la colonisation britannique, ils sont loin d’assumer leur rôle de bourreau d’un petit peuple voisin du leur... L’histoire a mémorisé deux personnages ayant joué un rôle clé dans la survie des ultimes Moriori, Hirawanu Tapu et Tommy Solomon. Hirawanu Tapu, parfois également appelé Maitarawai ou Taputehara Maitara (circa 1824- mai 1900) est né au sein d’une tribu avant l’invasion des Maori. Il a onze ans lorsqu’il assiste au massacre des siens. Il est ensuite emmené à Kaingaroa comme esclave du chef Wiremu Kingi Meremere. Dans les années 1850, il épouse une Moriori esclave elle aussi, Rohana Tini Waihe (décédée en 1915) et parvient à rentrer dans son île en 1860, après la mort de son maître. Il lit et parle alors Maori et Anglais (partiellement). Sur place, il se met au service des Moriori encore vivants pour faire du troc avec baleiniers et chasseurs de phoques. C’est lui qui devient l’écrivain du conseil Te Awapatiki, réunissant généalogies, contes, chants et légendes moriories. Tapu représenta son peuple lorsque celui-ci saisit les tribunaux pour récupérer ses terres en 1863. Il fut l’intermédiaire entre les ethnologues et les Moriori et il permit la rédaction d’un dictionnaire du vocabulaire moriori. Il mourut de tuberculose en 1900 à l’âge (présumé) de 76 ans. Tommy Solomon, de son vrai nom Tame Horomona Rehe (7 mai 1884-19 mars 1933) était un fermier passant pour avoir été le dernier Moriori non métissé. Il grandit dans la réserve de Manukau aux Chatham, avec vingt-quatre autres Moriori. Il interrompit sa scolarité en 1897 pour aider son père aux travaux des champs. En 1900, il était l’un des douze derniers Morioris. Costaud, volontiers indiscipliné, il canalisait son énergie dans le rugby (quand il n’avait pas quelques soucis avec les forces de l’ordre...). En septembre 1903, il épousa une Maori du clan Ngati Tahu et se forma à l’élevage des moutons. En 1915, ayant hérité de la ferme paternelle, il devint un éleveur, aisé financièrement, de moutons,chevaux et bovins.
Il s’enrichit d’autant plus qu’aux décès successifs des derniers Moriori encore en vie, c’est lui seul qui héritait de leurs biens. Sa femme décédée, il épousa la nièce de celle-ci qui lui donna cinq enfants. Très impliqué dans la vie de sa communauté, il jouissait d’un grand prestige. Souffrant d’obésité, de santé fragile, il décéda à 48 ans seulement d’une crise cardiaque suite à une pneumonie.
Des Moriori, vêtus de hardes fournies par des baleiniers et des chasseurs de phoques.
L' une des traditions des Moriori était de graver leurs symboles cultuels et religieux sur les troncs des arbres.
Deux femmes Moriori et un enfant. Moins de 100 Moriori survécurent au génocide de ce petit peuple. ( photo exposée au Te Papa Museum de Wellington )
Au milieu du 19ème siècle, ces têtes Maori sculptées aux motifs guerriers et aux couleurs violentes annonçaient la stratégie d' élimination brutale des Moriori par des Maori qui méprisaient leur faiblesse et leur pacifisme. L' invasion et la soumission des îles Chatham par deux clans Maori fut d'une extrême sauvagerie et le contentieux foncier n' est toujours pas réglé en 2021, les Maori refusant obstinément de rendre leurs terres ancestrales aux rares descendants du peuple Moriori.
Les Chatham sont un territoire rattaché à la Nouvelle-Zélande, avec une population de 6 à 700 personnes, Maori, descendants de Moriori et Européens d'origine.
L' île principale, baptisée Chatham, est proche au sud-est, d' une île plus modeste, l' île de Pitt. On notera la présence de lacs dans la grande île, ventée et largement arrosée par une pluie abondante et glacée. Les Îles Chatham n' ont rien de tropical, il faut le savoir.
Elles ont connu un regain de popularité touristique en cette période troublée de pandémie mondiale, les Néo-Zélandais étant interdits de sortie du pays. Du coup, les touristes locaux ont cherché où ils pouvaient partir en vacances exotiques, au sens premier du terme...
Ce furent les îles Chatham !
Encore 3 photos..
le râle weka des Chatham, cousin du kiwi néo-zélandais continental
Cyprès de Lambert ou de Monterey que l' on trouve aussi sur la côte atlantique française, de la presqu'île de Crozon à l' île de Ré.
arbre akeake soumis au vent violent des Îles Chatham
A bientôt
Ma découverte récente de l' histoire tragique des Moriori a fini par piquer ma curiosité et j' ai décidé de compléter les posts précédents par une information un peu plus détaillée sur ces fameuses Îles Chatham ) devenues à la mode et redécouvertes par les Néo-Zélandais eux-mêmes pendant cette période d' isolement physique et géographique que s'est imposé le pays.
UN PEU DE GEOGRAPHIE
L' archipel, d'une superficie d'environ 1000 km2, est situé à 800 kms environ de la ville de Christchurch à l' est de l' île sud. Il est constitué d' une dizaine d'îles dont deux seulement sont habitées, cultivées, dédiées largement à l' élevage, mais aussi dotées de forêts, et dotées d'infrastructures telles que routes goudronnées et aéroport : Chatham (ou Rekohu / Wharekauri en moriori ) et Pitt (ou Rangiauria ). Les autres îlots ou récifs plus ou moins importants sont inhabités et sont devenus des réserves naturelles de faune et flore assez uniques dans leur genre.
L' île principale culmine à 300 m d' altitude, les paysages sont doucement vallonnés, la population des deux îles atteint environ 620 personnes et la bourgade principale de Chatham est Waitangi.
Chatham est parcourue de nombreux cours d'eau et comporte de nombreux lacs ainsi qu'une lagune, Te Whanga dans sa partie centrale.
Le climat peut être rude et venteux, de type subpolaire océanique.
Les Îles Chatham se situent aux antipodes du village d'Alzon dans les Cévennes gardoises et demeurent la seule partie terrestre des antipodes métropolitains. Le panneau routier d'entrée dans le village signale cette curiosité géographique.
UN PEU D'HISTOIRE
En préambule, je vous renvoie à mon carnet de voyage à Taïwan dans Voyage Forum qui mentionne l' existence dans cette île du sud-est asiatique la présence d'une tribu aborigène, les Rukai, dont on a découvert qu'ils avaient exactement le même ADN que les Polynésiens.
Cette tribu, comme les autres ( 14 en tout ) a été, au fil des invasions colonisatrices, repoussées de la côte ouest de l' île vers le centre montagneux et l' est. Mais ils ont des pirogues dans leurs fresques historiques et ont donc circulé sur l' océan pour atteindre les rivages des Marquises actuelles ( Hiva Oa en premier ) et de là, en l' espace de quelques siècles, repartir vers d'autres cieux et d'autres îles telles que les îles Hawaii, l' Île de Pâques, les Tuamotu, les Australes en particulier Tubuai,puis les Îles du Vent et sous le Vent, en particulier Raiatea, et son 'marae' de Taputapuatea d'où sont parties des centaines de candidats à la découverte de la Nouvelle Zélande.
C 'est après cette digression que je reviens aux Moriori, arrivés au 15ème siècle aux Chatham, en provenance de Raiatea peut-être, voire de Hiva Oa directement ou des Australes après avoir dérivé vers le sud sur l' océan pacifique. Le mystère demeure, mais les Moriori sont physiquement et ethniquement des Polynésiens de souche, frères devenus ennemis des Maori ayant migré, quant à eux, directement vers ce qui est aujourd'hui la Nouvelle-Zélande ( île nord et île sud ) avant de décidé d'étendre leur influence au début du 19ème siècle sur les îles Chatham, dont certains, engagés comme matelots sur des baleiniers avaient par hasard découvert l' existence. Les belliqueux Maori du continent, prévenus par le bouche-à-oreille, n' allaient faire qu'une bouchée des pacifiques Moriori, une population éparpillée de 2000 personnes sans défense.
Ce génocide tropical avait réduit la population moriori à à peine une centaine de personnes qui ont survécu vaille que vaille ( grâce à la présence politique et marchande britannique ), se sont mélangées et mariées avec des Maori du continent et des européens.
Leurs descendants ré-affirment actuellement leurs droits,leur identité, leur langue et ont exigé que les Maori leur restituent leurs terres volées pendant la conquête. Tout cela est discuté âprement devant les tribunaux car les Maori refusent obstinément de rendre quoi que ce soit, ou même de s'excuser pour la destruction des 'marae' moriori.
Le gouvernement néo-zélandais a commencé à rétrocéder aux Moriori des terres appartenant à l' état et des droits de pêche ancestraux. Mais le contentieux est loin d'être résolu.
C' est en 1791 que le navigateur anglais, à bord du HMS Chatham prend pied sur un archipel peuplé alors uniquement de Moriori vivant de chasse, pêche et cueillette. Il devient alors rapidement une base stratégique pour les chasseurs de baleines et de phoques, puis, après 1861, pour uniquement des pêcheurs.
TRANSPORTS
Les Îles Chatham sont reliées par avion en une heure et demie à deux heures à Christchurch, Auckland et Wellington. Une nouvelle piste d'atterrissage moderne a été construite en 1991 pour remplacer la première piste en herbe de Hapupu au nord de l' Île Chatham.
La compagnie aérienne Air Chathams assure ces trajets.
Un séjour aux Chatham est forcément orienté nature, randonnées sauvages et découverte de plantes et oiseaux uniques, tels le miro des Chatham ou le très rare pétrel de Magenta.
Il faut naturellement réserver son séjour à l' avance via chambre d'hôtes ou airbnb et une petite hôtellerie à l' ancienne.
Les Îles Chatham ont leur propre drapeau ( voir photo ci-après )
Quelques photos supplémentaires
Cottage fermier sur l' île de Pitt
Pétrel de Magenta
le miro
Variété de myosotis ( forget-me-not en anglais ) géant endémique aux Chatham
Finalement cet endroit isolé du monde est plutôt attirant. il faut y aller en janvier pour apprécier des températures au dessus de 20° dans la journée ( 25° maxi ).
Mais il faut pouvoir et vouloir s'y rendre. D' abord Auckland puis un vol supplémentaire ( mais pas plus long que Tahiti -Kauehi... ). Il est préférable d'attendre que la pandémie ait rendu les voyages plus faciles et aient fait oublier les Chatham, y compris aux Néo-Zélandais dont beaucoup préfèrent les plages ensoleillées de Phuket ou de Kho Phi Phi aux bords de mer ventés de Chatham ou de Pitt...
Moana
Quelques photos des Îles Chatham, îles du bout du monde pour les amateurs de fraîcheur exquise et de nature sauvage, en particulier les oiseaux de mer, et les cétacés du genre baleine ou orque.
L' île principale est reliée à la Grande Terre par avion. Distante de 80à kms environ de la NZ, ces îles sont accessibles aussi par bateau mais il faut du temps...